Qu'ont en commun Leonard Cohen, Jackie Robinson, Maurice Richard, Guy Lafleur, Diego Maradona et maintenant Hugo Houle? Ils font tous partie des immortels qui sont représentés sur des murales peintes aux quatre coins de la métropole et qui embellissent aujourd'hui le paysage montréalais.
Le trio d'artistes muralistes québécois formé de Fred Fuse, Zek One et Dodo Ose, le collectif Projet Tyxna, ont mis un mois plus tôt cette année pour réaliser une fresque géante, d'une superficie d'environ 650 mètres carrés (7000 pieds carrés), qui immortalise la victoire d'étape de Houle au Tour de France en 2022. Celle-ci a été réalisée sur le mur d'un immeuble appartenant à Sylvan Adams, le propriétaire de l'équipe Israel Premier-Tech, celle pour laquelle évolue le cycliste de Sainte-Perpétue, sur l'avenue du Mont-Royal, à Montréal.
Les Montréalais peuvent en effet l'observer sur la fameuse murale, en pleine action, les yeux et le bras tendu vers le ciel, alors qu'il franchissait le fil d'arrivée de la plus prestigieuse course cycliste au monde en premier, le 19 juillet 2022. Cette victoire, l'un des nombreux faits saillants de la carrière du cycliste âgé de 34 ans, revêtait à l'époque une charge émotive particulière.
Le frère de Houle, Pierrik, a perdu la vie après avoir été heurté par un chauffard en 2012. Dix ans plus tard, son frère remportait la 16e étape de la Grande Boucle, qui se déroulait entre Carcassonne et Foix. Il est alors devenu le premier Québécois à gagner une étape du Tour de France, et seulement le deuxième Canadien à réaliser l'exploit, après l'Ontarien Steve Bauer en 1988.
« Sur le moment, c'est clair que c'était beaucoup d'émotion, a admis Houle en visioconférence de sa résidence monégasque, mardi. Après, nous sommes trois ans plus tard, ce matin, je me suis levé et c'est un matin comme un autre pour moi. Je ne pense pas à ça tous les jours; je me concentre plus sur mon quotidien et sur mes futurs objectifs... Ceci étant dit, c'est sûr que chaque fois que je vois la photo, je vis un moment, et ça me rappelle de beaux souvenirs. »
Houle ignore comment il réagira au moment du dévoilement officiel de la murale, qui aura lieu en septembre en marge des Grands Prix cyclistes de Québec et de Montréal (GPCQM). Il tient également à la voir de ses yeux avant de pouvoir commenter.
« De mon côté, ce sera sans doute un moment de bonheur, une belle reconnaissance. On verra en temps et lieu comment je me sentirai. Il faut d'abord que je la voie en vrai. Mais pour moi, ce sera surtout du bonheur et un privilège d'avoir cette fresque-là, sur l'immeuble de Sylvan », a-t-il résumé.
Une chose est certaine, toutefois, c'est qu'il souhaite pouvoir transmettre un message aux adeptes du cyclisme québécois.
« J'ai prouvé que c'était possible de gagner au Tour de France, avec beaucoup de travail et d'acharnement. Ç'a été un travail de longue haleine; ç'a quand même pris plusieurs années pour arriver à ça. C'est un peu le message que je veux livrer: avec de la discipline, de la persévérance, je suis arrivé à atteindre cet objectif-là », a déclaré Houle.
Un programme chargé, un avenir à définir
En attendant ce moment qui promet d'être chargé en émotions, Houle s'est accordé un mois de repos. Il a récemment repris l'entraînement pour le dernier droit de la saison.
« C'était un peu tranquille au mois de juillet. Là, j'ai remis la machine en route en vue de ma prochaine course, la Course arctique de Norvège (du 7 au 10 août), puis je compte participer au Grand Prix de Plouay (le 31 août), parce que les distances sont similaires à celles des GPCQM, et ensuite je vais essayer de bâtir pour être prêt à temps pour les GPCQM », a-t-il évoqué.
Le Québécois a admis du même souffle être très heureux d'être sur son divan et de ne pas devoir jouer du coude avec le reste du peloton au Tour de France, qui se déroule présentement dans l'Hexagone.
« Je suis en paix avec mon choix. Je sais à quel point c'est difficile d'y participer. Le stress de la première semaine, les chutes... Je connais le Tour (de France), je l'ai fait à six reprises, et maintenant je veux me concentrer sur les GPCQM. C'est ce que je compte faire aussi l'an prochain, afin d'être prêt pour les Championnats du monde de 2026 à Montréal », a-t-il dit, en ajoutant qu'il aimerait bien aussi signer une victoire d'étape au Tour d'Italie en 2026.
Ça ne l'a pas empêché de jeter un oeil à la Grande Boucle et d'apprécier le travail de ses compatriotes, Guillaume Boivin et Michael Woods, qui pointent respectivement aux 59e et 155e échelons du classement général avant la 16e étape présentée mardi.
« J'aime bien voir les gars de l'équipe lorsqu'ils participent à des échappées ou qu'ils se placent en position de gagner l'étape. C'est toujours plus intéressant à regarder. À date, ils ont bien couru. Guillaume a pris part à quelques sprints, même si après la 10e étape c'était pas mal terminé. Il y aura peut-être demain (mercredi), mais les coureurs semblent fatigués, après les échappées des gros groupes. Donc, ça va être difficile pour Guillaume. Quant à 'Mike', il est encore très actif, même s'il n'a toujours pas trouvé l'ouverture pour aller chercher un bon résultat », a résumé Houle.
Le principal intéressé, qui possède un contrat en poche avec Israel-Premier Tech jusqu'à la conclusion de la saison 2026, ignore ensuite ce que l'avenir lui réservera.
« Après, on verra les opportunités. C'est clair qu'il en reste beaucoup moins qu'il en restait (devant moi) — peut-être une saison de plus, au maximum. J'ai eu une belle carrière, je suis assez serein avec tout ça », a-t-il évoqué, en ajoutant qu'il aimerait bien continuer d'oeuvrer dans l'univers du cyclisme de haut niveau après la fin de sa carrière sportive.
« Je veux redonner au vélo, aux jeunes Québécois. Je pense que j'ai acquis beaucoup de savoir en Europe, beaucoup de contacts ici, donc j'aimerais avoir un impact sur les jeunes, parce que je ne serais pas où je suis aujourd'hui sans les gens qui m'ont aidé », a-t-il résumé.
Et qui sait, il le fait peut-être déjà sans le savoir, grâce à sa murale.